Souvenirs d’EHPAD #23 : la grande vadrouille de Manille

Il est l’heure de clore cette série des souvenirs d’EHPAD. Pour l’occasion j’ai eu envie de parler de notre Manille préférée.

Vous vous doutez bien que Manille était la mascotte de la résidence. Quand on franchissait les portes de l’EHPAD je lui retirais sa laisse et son harnais et la laissais vagabonder librement. Elle ne me quittait jamais mais elle pouvait aller voir les résidents qui l’appelaient.

J’avais réussi à lui apprendre un adorable tour: je roulais Le Parisien du jour et la chienne allait l’apporter à Madame Canari.

Il y avait cette vieille dame italienne qui la laissait toujours lui lécher les mains et qui expliquait que chez elle on pensait que la bave de chien soignait tout (faudra m’expliquer le truc parce qu’en ce moment mes mains sont explosées par le froid et Manille a beau me les lécher ça n’y fait rien).

Quand on arrivait elle faisait la toupie sur la place du village.

Je ne sais pas ce qu’avait Monsieur Flotte mais il était complètement plié en deux et avançait penché en avant. Il formait un angle droit et avait dû être très grand dans sa jeunesse car on faisait pratiquement la même taille comme ça. Un jour Manille s’est couchée sur le dos en lui montrant son ventre et il a juste déplié un long bras pour le lui caresser.

Le problème c’est que les gens ne se souvenaient pas (ne voulaient pas se souvenir?) qu’il ne fallait pas lui donner à manger, surtout pas du chocolat. c’était la fête du slip quand venait l’heure du goûter et que l’on servait à manger aux résidents sur la place du village. Manille a eu droit à du marbré, du gâteau au chocolat, du clafoutis aussi peut-être. Un épisode particulier m’a amenée à enfermer la chienne dans une salle à part au moment du quatre heures.

Avec ma cheffe, mon collègue de service civique, quelques résidents et les membres de leur famille nous sommes partis dans un café proche de l’EHPAD un après-midi. J’ai préféré y aller à la canne et laisser Manille à la résidence. Enn fait je m’imaginais avec la chienne semant le groupe de fauteuils roulants dans la rue. Je l’ai laissée à une employée qui était la comptable si je me souviens bien. Elle partageait son bureau avec ma cheffe et ^celui-ci était au rez-de-chaussée, à côté de la place du village. On pouvait y accéder de là par une porte battante ou en passant par l’accueil.

Tout se passait bien, Manille était sage dans le bureau et puis à un moment elle s’est fait la malle (au moment du goûter pour être précise). Quand elle s’en est aperçue, la comptable est allée la chercher et parait que Manille se « cachait » derrière les fauteuils roulants quand elle l’appelait par son nom.

Bref, Manille a été rapatriée dans le bureau. Mais l’histoire ne s’arrête pas là.

Nous sommes revenus du café quelques instants après. La comptable m’a expliqué ce qui venait de se passer avec Manille-pulatrice. Choquée et déçue par tant de fourberie. Je suis allée aux toilettes, la laissant une nouvelle fois dans le bureau où il y avait désormais ma cheffe et la comptable.

Vous savez quoi? Devinez.

Manille s’est re-fait la malle en passant par l’accueil. Elle est retournée sur la place du village bouloter dans le plus grand des calmes.

Vous savez ce qui était servi aux résidents ce jour-là?

Du putain de flan au rhum.

Quand on est rentrées la chienne ne marchait pas droit.

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