Bastante

Aviez-vous remarqué que « bastante » (ça veut dire « assez » en espagnol) et « battante », à une lettre près, ça s’écrit pareIl? Je parie que non. Eh bien, moi, je dis: il y en a assez de se battre! Voici un article coup d’épée dans l’eau ou pet de mouche dans un verre (cette dernière expression n’existe pas, mais j’aime bien l’image).

Début novembre, j’ai été dans mon centre-ville, à pied, avec Manille. J’y allais avec deux objectifs: me rendre à la pharmacie pour acheter un médicament puis passer à la banque pour tirer de l’argent. J’étais assez stressée, car je n’étais pas allée là-bas depuis un moment, et maintenant je ne vois plus rien. Avant, je compensais un peu visuellement car j’arrivais à voir sur les côtés. À présent, ma vue ce n’est pas tout noir, c’est tout gris avec plein de phosphènes (des espèces de petits scintillements, j’appelle ça des « acouphènes de yeux », ça fait peut-être enfantin comme expression mais je crois que l’idée est là: ce sont des sensations parasites). Et un chouia de perception lumineuse (tellement fiable que des fois je ne sais pas si la lumière est allumée ou non).

Je vois beaucoup, sur les réseaux sociaux, des handi qui prônent un discours héroïque du handicap: « tout est possible avec un handicap! Fais de ton handicap une force! Courage, résilience et ambition! Machin-bazar ». En écrivant ça, je me demande: à qui s’adresse réellement cela? De vous à moi, c’est très bien si des personnes peuvent en motiver d’autres. Peu après mon diagnostic de rétinite pigmentaire (j’étais ado, hein), j’ai cherché des « modèles », des gens avec une déficience visuelle qui faisaient des trucs comme du skate ou de la boxe, parce que j’avais une estime lamentable de ma vie et que j’avais besoin de voir des gens « comme moi » continuer à vivre. Mais, je trouve ce discours de l’handicap-héroïque un brin culpabilisant. Avant de courir un marathon malgré mon handicap (car, oui, je ne l’ai pas dit mais j’ai horreur de courir, je suis une handicapée de la course à pied), mon grand défi c’est de faire des choses plutôt banales au quotidien. Aller au centre-ville ce jour-là en faisait partie.

Si j’ai pu aller au centre-ville, rien ne s’est passé comme prévu: mon médicament n’était pas disponible (après coup, j’ai découvert que le truc n’était vendu qu’en parapharmacie ou en ligne, j’ai bien fait de ne pas courir à une autre pharmacie); pour la banque, j’ai attendu 15-20 minutes que la personne au guichet vienne me voir (avouez que pour retirer 40 balles, ça fait un peu long) et ensuite la communication (via TactilAudio) n’a pas été bonne.

Quand je suis partie au centre-ville, j’avais cette phrase que le père de Maysoon Zayid lui disait (je rappelle qu’elle a une paralysie cérébrale): « You can can » (on pourrait traduire ça en français par: « Tu peux pouvoir ». Et donc, je me répétais: « Tu peux pouvoir ». Certes, je peux. Mais différemment. L’expérience m’a permis de réaliser qu’il fallait que je revois mon organisation.

Récemment, j’ai formulé l’idée que j’avais besoin de souffler. On en reparlera plus tard, mais j’ai eu beaucoup de chance il y a peu (je ne parle pas de mes carencs) et « souffler » sera possible prochainement. Mais, oui, en attendant, j’en ai ma claque de me bagarrer pour un truc aussi stupide que d’aller au centre-ville. Bien sûr, le « problème » vient de moi et il faut « juste » que je redéfinisse mes besoins. Mais, je suis fatiguée (je ne parle pas de mes carences).

Un commentaire

  1. Avatar de biche* biche* dit :

    Bonjour, je vous envoie tout mon soutien. Moi aussi parfois j’envisage de choisir la facilité du genre livraison des courses à domicile ou drive, livraison de repas tout prêt à domicile, femme de ménage, etc… Mais bon, tant que l’on peut le faire on ne passe pas à l’action pour prendre ces décisions qui facilitent bien la vie.

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