Cave à vaincre

J’aime pas descendre à la cave. J’ai peur d’y rencontrer de méchantes créatures comme des goules.

Vous penserez peut-être: « Bah descend avec Manille », ce à quoi je vous répondrais non. Déjà, il y a de la mort-aux-rats partout par terre dans la cave. Manille est parfois un peu con (oui, désolée de vous décevoir) et je voudrais pas qu’elle en mange. Ensuite, quand bien même, elle a pas l’air de vouloir y aller non plus. Elle, pourtant si pot de colle, reste figée en haut des marches avec une mine penaude. Je sais pas vous mais personnellement je trouve ça très louche qu’un chien se comporte comme ça. C’est la preuve qu’il y a quelque chose de pas net dans la cave.

Du coup pour me donner du courage j’y descends en fredonnant la mélodie de The last walt5. Croyez-le ou non, ça marche: je n’y ai encore croisé aucun monstre.

Robert

J’ai eu un coup de foudre pour Robert lors d’une sortie à la jardinerie. Devant ses grands yeux marrons, son petit sourire charmeur et sa coiffure improbable, j’ai su que nous étions faits l’un pour l’autre. Cette rencontre remonte à mon enfance donc je ne m’en souviens pas mais à l’issue de celle-ci ma mère a cédé à mon caprice et m’a acheté ce hérisson décoratif de jardin.

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« Sorry, I cannot hear you I’m kinda busy »

Quand j’ai eu mon 1er implant cochléaire j’ai modifié l’annonce de mon répondeur. Il fallait bien que je comprenne mes messages vocaux. Ça ressemblait à: « Bonjour, vous êtes sur le répondeur de Bibi! Je ne suis pas là pour le moment alors laissez-moi un message! J suis sourde, parlez lentement et artiaulez bien! ». Malheureusement ces instructions ne devaient pas être claires car souvent lorsque les gens laissaient un message sur mon répondeur ils avaient l’air de parler dans leur manche avec le débit vocal de Scatman John.

Un jour j’en ai eu un peu marre, et comme je suis feignasse sur les bords, j’ai de nouveau changé mon annonce. Ça donne: « Bonjour, vous êtes sur le répondeur de Bibi! Je suis sourde, merci de laisser un sms! »

Quand j’étais petite, chez ma tante, on regardait ce vieux dessin animé appelé La noiraude. C’était une vache qui appelait son vétérinaire au téléphone pour lui raconter ses malheurs. Les épisodes étaient courts et débutaient toujours de la même façon: la caméra se rapprochait de l’étable avec une petite musique puis on voyait la Noiraude avec son combiné à l’oreille. C’était la secrétaire du docteur qui décrochait, la Noiraude se présentait et demandait à lui parler. La secrétaire répondait avec une voix de crécelle insupportable: « Ne quittez pas, j’vous l’passe! », ce qui faisait éloigner le téléphone de son oreille et grimacer la Noiraude.

Bien, je trouve que j’ai exactement le même ton que la secrétaire sur mon répondeur actuel.

Pour toi Tata Clown.

Convoi de l’extrême

Lundi matin quand je me suis réveillée une vilaine odeur flottait dans l’air. J’ai pensé que Stella, dont la caisse est dans la salle de bain juste à côté de la chambre, venait de poser sa pêche.

Manille était couchée à côté du lit, la chatte attaquait ma main sous la couette, bref à part le fumet pestilentiel tout avait l’air normal.

Je me suis levée, j’ai pris mon legging et mes chaussettes pour sortir Manille et je suis allée m’asseoir sur une chaise de la cuisine. L’odeur s’est faite plus forte. J’ai pensé que Stella avait eu un accident dans la chambre et que j’avais marché dedans. J’ai inspecté mes pieds: rien. Je suis allée voir dans la salle de bain et le bureau mais ça y sentait moins fort. Je suis revenue m’asseoir sur ma chaise, perplexe.

Et puis je me suis retournée.

Il y avait de grosses flaques sombres sur le carrelage. L’une des quadru avait eu la diarrhée pendant la nuit. Quand je dis « l’une des quadru » je veux dire Manille car vu la taille des flaques ça ne venait pas de la chatte. Et quand je dis « diarrhée », le mot est faible pour décrire la scène d’horreur que j’avais sous les yeux (et le nez).


J’ai sorti Manille en ricanant parce que j’avais laissé Stella enfermée sans ouvrir les fenêtres. Ensuite je suis rentrée et j’ai nettement moins rigolé quand il a fallu commencer à nettoyer.

J’ai contourné la table pour ouvrir les fenêtres sans risquer de marcher dans la mare sans canard (n’aggravons pas la situation). J’ai remonté mes manches et j’ai fait un chignon. J’ai mis le masque de chantier que m’avait donné mon père, celui avec deux gros élastiques et un système de serre-nez. J’étais parée.

Je n’ai trouvé Stella nulle-part et elle n’est pas venue sur le rebord de la fenêtre comme à son habitude. J’en ai déduit qu’elle était restée trop longtemps dans les effluves et qu’elle avait dû faire un malaise sous un meuble.

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Le nouvel auxiliaire vétérinaire

Manille a deux boules sur les flancs. Je suis allée voir ma vétérinaire il y a 3 semaines qui m’a dit de revenir prendre un rendez-vous pour l’opérer d’ici la fin du mois. Je ne suis pas inquiète car il y a 2 ans la chienne a fait un lipome sous une aisselle, une tumeur bénigne de graisse (Manille qui fait des tumeurs de gras, ça étonne qui?). C’est une pathologie courante chez les labradors surtout femelles et les récidives ne sont pas exclues.

Hier je suis allée chez la vétérinaire pour racheter son antipuce et son silicure (un médicament qu’elle prend car elle a un souci avec son foie) et aussi pour programmer l’opération. Les vétérinaires et les auxiliaires vétérinaires dans ce cabinet nous connaissent bien moi et ma surdicécité (et ma chienne guide intenable parce que c’est le festival du biscuit là-bas). Niveau communication on alterne entre oral et écrit via mon téléphone connecté à ma plage braille. Elles ont l’air globalement à l’aise avec moi.

Hier pourtant il m’a semblé qu’il y avait un nouvel auxiliaire à l’accueil et il a eu l’air assez déstabilisé par ma présence. En fait je suis rentrée dans le cabinet et me suis assise sur une chaise en attendant mon tour (et en demandant 15 fois à Manille de se calmer). Un jeune homme brun à lunettes (c’est tout ce que ma vision me permet de décrire) a fait son entrée dans la salle d’attente. Il y avait quelques personnes déjà. Il est allé voir un monsieur puis il est venu vers moi. J’imagine qu’il m’a dit un truc et que j’ai laissé passer ma chance parce qu’ensuite j’ai attendu 10-15 minutes et même les gens arrivés après moi sont passés avant moi (décidément ça m’arrive souvent ces temps-ci). Le brun est revenu me voir plus tard et je lui ai tendu mon téléphone en disant: « Désolée je comprends rien. » (sans déconner René). Je lui ai expliqué pourquoi je venais. La vétérinaire est venue palper les boules de Manille (qui faisait subitement moins la maline) et il m’a écrit qu’il fallait lui faire un bilan sanguin pour son foie avant de l’opérer.

Là j’ai tilté que le brun n’était pas auxiliaire vétérinaire car il avait l’air un peu perdu et m’a posé des questions bizarres. Je me trompe peut-être mais on va partir du principe que c’est ça, je pense qu’il était en 3e et qu’il faisait son stage. Il avait la voix grave mais on faisait à peu près la même taille (t’inquiète Brun je triche un peu avec mes Rangers, moi je suis québlo à 1,59 m depuis que j’ai 14 ans mais toi tu peux encore grandir, et au pire c’est pas grave la vie est belle en bas tu sais) et il m’a demandé comment ça se passait habituellement lors des prises de sang, est-ce que je nourrissais Manille avant ou pas. Et en effet quand il est venu m’apporter les médicaments il avait l’air un peu jeune, Brun. Il avait l’air en galère mais au final je trouve qu’il s’est très bien débrouillé et il s’est détendu au fur et à mesure de l’échange. Ça fait plaisir.

Bref Manille a rendez-vous jeudi matin prochain pour faire une prise de sang.

À sa mutuelle qui refuse de me rembourser son Silicure car selon eux c’est « un médicament de confort » alors que (vous l’aurez compris) son problème de foie nécessite une analyse avant de l’opérer: allez bien vous faire cuire le cul.

Cours Forest

J‘avais un rendez-vous à 14h. Pour m’y rendre je devais emprunter le bus au bout de ma rue. L’application pour programmer des trajets m’avais dit que je pouvait avoir mon bus en sortant de chez moi à 13h33, mais elle avait fait ce calcul sans inclure la possibilité que mon chien puisse s’arrêter pour demander à faire caca. Par précaution j’avais donc décidé de partir un peu plus tôt.

À 13h23, comme j’étais déjà prête j’ai décidé de partir avec Manille. J’avais juste pris mon joli petit sac à dos pour ne pas m’encombrer, j’ai fermé ma porte et glissé mes clés dedans. J’ai descendu l’escalier de mon immeuble et j’ai ouvert la porte d’entrée.

« Oh fait chier… » ai-je bougonné (mon père ne va pas être content en lisant mon article parce qu’il y a des gros mots pourtant il dit exactement la même chose avec la même intonation quand il bricole et que ses outils « ne marchent pas », sans vouloir balancer).

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Bibi la plomberie

Cela faisait deux fois que le savon passait mystérieusement du rebord du lavabo à celui de la baignoire. J’ai fini par demander à Eren pourquoi il déplaçait le savon comme ça.

« Parce que je suis un esprit libre. » a-t’il répondu. Effectivement à bien des égards c’est même un sacré acte de rébellion.

« Non mais ça fait deux fois que tu mets le savon sur le rebord de la baignoire, c’est pas juste que t’es un esprit libre si? » ai-je demandé.

« non en fait je me lave les mains dans la baignoire parce que le lavabo est bouché et que j’ai pas encore racheté du déboucheur. »

Astucieux.

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Seroparti

Jeudi dernier ma séance chez la psy a été particulièrement rude. Non, ça ne va pas très bien en ce moment. Elle m’a dit qu’il faudrait peut-être me faire hospitaliser. À ces mots je suis devenue rouge comme une tomate, j’ai littéralement fondu en larme tout en baragouinant que je na pouvais pas. Si l’hystérie existait vraiment, probablement qu’elle aurait eu ce visage-là. Ridicule mais véridique, je ne voulais pas envisager cette option en pensant « Mais que va devenir Stella? Et Manille? ». Elle m’a alors dit qu’il faudrait aller voir mon médecin pour « pas que ça s’installe »; ce qui est gentil mais étant donné que je fais des dépressions à répétition depuis bientôt 10 ans et que j’ai seulement commencé à prendre en charge le problème l’an dernier, je pense que le mal est bien installé déjà.

Pour de vrai ça fait quelque temps que je sens le truc venir mais que j’essaye de le tenir à distance. Je pensais qu’en ayant des projets, en faisant des activités, en « restant en mouvement » ça ne reviendrait pas. Bon eh bien j’ai trébuché et là je suis doucement en train de manger les pissenlits (par les pétales, gardons espoir!!!).

En rentrant chez moi ce jour-là j’ai été sur Doctolib (si j’étais une influenceuse à succès je leur demanderais qu’on fasse un partenariat ensemble) et j’ai pris rendez-vous avec ma généraliste. Pas de disponibilité avant mardi 9 mai avec son remplaçant. On était jeudi 20 avril. Plus de 15 jours à attendre comme ça mais tant pis, je prends.

Comme la 1ère fois, que ma psy me dise « ohla, faudrait ptêtre aller voir votre toubib » ça m’a fait du bien. Bon, je suis rentrée chez moi un peu plus anéantie (« ah, c’est revenu… ») mais d’un coup le problème devenait visible par elle (et par moi, hashtag déni). Des semaines que je luttais pour ne pas rechuter. À la différence de l’an dernier, je me sens quand même un peu plus armée.

J’ai commencé à me dire qu’il y avait peut-être une justice ou une entité bienveillante quelque part quand le lendemain (vendredi 21 avril), alors que je lisais tranquillement, j’ai reçu une notification de Doctolib m’informant qu’une place s’était libérée plus tôt et que je pouvais avancer mon rdv au lundi 24 avril. J’imagine qu’en temps de pandémie je serais ce genre de personne à pousser les gens des coudes ou à leur faire des croches-pied devant le dernier paquet de pâtes à Super U en criant: « Poussez-vous les gueux, il est à moiiii!! ». C’est en tout cas comme ça que je me suis perçue sur le moment, en suppliant l’application de décaler mon rdv avant qu’un autre patient le fasse, « Allez allez allez dépêche bordel de quiche! ». Et c’est ainsi que j’ai pu avancer mon rdv d’une quinzaine de jours.

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Ma podologue madame Sourire

Ma condition d’aveugle m’a conduite cet été à enfin sauter le pas de la pédicurie, se couper les ongles de pieds étant devenu difficile avec la perte de la vue et ne supportant plus d’avoir des panards de troll des montagnes à la saison des sandales. Ma podologue, madame Sourire, est une adorable personne et je suis contente de retourner la voir chaque mois. À quelques jours de ma 2de implantation j’ai donc repris rendez-vous avec elle afin d’être prête de la tête aux pieds le jour de l’opération.

Je sortais de ma grippe étrange, j’avais encore un peu de mal à marcher droit sans ressembler à une étoile de mer un 14 juillet. Elle a tout de suite vu ce qui clochait en venant me chercher dans la salle d’attente:

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Rencontre du 3e type à 03h00 du matin avec moi-même

La lumière du couloir a inondé ma chambre en pleine nuit alors que je fer^me toujours ma porte quand je dors chez mes parents. J’ai checké mon téléphone mais je n’avais pas de message de mon père. J’ai pensé:

« Papa s’est senti démuni, il est venu mais il n’a pas osé me réveiller et il est reparti. Il y a un problème avec Manille. C’est le thon. »

J’ai pensé ça car dans la soirée mon père a complété la pâté de Manille par une boîte de thon sans sel.

« T’es trop paniquée. Manille a un estomac en acier, elle a passé 2 ans avec une balle coincée dedans », me dira Eren le llendemain, ce à quoi je répondrai: « Tu demanderas à ma mère comment c’était quand la chienne a eu la gerbe chez ma grand-mère. ».

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