Crise de foie

Cher lectorat,

Un petit article particulier ce jour puisque je l’ai rédigé la veille de sa publication (et j’ai décalé celui qui était initialement prévu aujourd’hui au vendredi 10 octobre 2025).

Pour commencer: ne vous inquiétez pas. Ça va.

Vous vous souviendrez peut-être que Manille souffre, en plus d’un incurable pète au casque, d’une hépatite congénitale. Sa première crise a eu lieu durant l’automne 2022. La seconde, qui lui a valu une hospitalisation et une ablation de la vésicule biliaire, a eu lieu à la fin de l’année 2023. Depuis cette seconde crise elle prend des cachets tous les jours (dont les fameux « médicaments de confort » que sa mutuelle ne veut pas rembourser) pour limiter le risque de rechute.

Cela faisait presque deux ans qu’elle n’avait pas refait de crise. Et puis mercredi elle avait un petit appétit. Jeudi matin elle n’a carrément pas mangé sa gamelle.

Avec Père nous avons donc foncé à l’école vétérinaire de Maison-Alfort (en réalité je lui ai dit de prendre son temps car Manille n’était pas du tout abattue donc son état ne m’inquiétait pas encore). Il faut prendre un rendez-vous quand on va aux urgences vétérinaires là-bas, ce que nous n’avions pas fait alors nous avons attendu plus longtemps.

À un moment, un vétérinaire est venu me parler et sa collègue a examiné Manille. J’ai cru que cet examen était fini alors j’ai caressé le dos de Manille. C’est en arrivant au bout que j’ai réalisé que sa queue était complètement redressée, à la perpendiculaire, signe qu’on était probablement en train de lui enfoncer un thermomètre dans le fion.

Vers 14h, l’équipe de vétérinaires m’a proposé d’embarquer Manille pour lui faire une prise de sang et une échographie. Sitôt la chienne partie, j’ai dit à Père: « Maintenant que Manille n’est plus là, on peut prendre quelque chose au distributeur? ». Oui bah c’est cruel mais j’avais la dalle moi, je n’ai pas une hépatite congénitale.

Père m’a ramené un chocolat chaud et un paquet de petits gâteaux bretons du distributeur. Attention, préparez-vous à un enchaînement de bourdes de type Pierre Richard.

D’abord, tandis que je boulotais paisiblement, Père m’a retiré mon paquet de biscuits des mains. « Ça fait des miettes sur la plage braille » (cela peut encrasser les cellules et bloquer les points de l’afficheur braille). D’ordinaire je ferme le « clapet » de la machine quand je mange au-dessus, mais là je ne sais pas pourquoi j’ai oublié de le faire. J’ai donc rabattu le clapet et Père m’a rendu mes gâteaux.

Ensuite, gobelet de chocolat chaud dans la main gauche et paquet de gâteaux dans la main droite, plage braille dans son étui sur les genoux, j’ai commencé à farfouiller pour prendre un biscuit dans le paquet. Là, Père m’a arraché le gobelet des mains et j’ai senti un truc chaud sur ma cuisse. « C’est pas vrai », ai-je dit en faisant des yeux ronds (comme si ça allait atténuer la chose). En fait, en prenant un biscuit j’avais un peu penché mon gobelet et renversé une partie de chocolat chaud sur ma jambe. J’ai tâté l’étui de la plage braille qui n’avait pas été aspergé: « J’ai de la chance! », ai-je dit (pensez à ça quand vous lirez mon article de demain svp).

On pourrait croire que la malédiction-Pierre Richard s’arrête là, mais non. Pile alors que j’avais un biscuit dans la main, Manille est réapparue. La honte. La maîtresse nulle qui s’empiffre dès que le chien malade et mourant n’est pas là. Manille a eu l’air contente de me voir (ou bien elle était contente de voir le gâteau). J’ai dit: « C’est à moi! C’est le mien! », et Manille a répondu silencieusement: « Wouaaaah, ça me donne la nausée mais il a l’air bon ce biscuit! ».

La vétérinaire qui s’était occupée d’elle a dit que ça avait été sa meilleure patiente, ce qui me rend bien sûr fière mais ne m’étonne pas trop car Manille est très docile quand on lui fait passer un examen médical (même les prises de sang, pourtant pas agréables, elle reste stoïque et le regard dans le vide).

Comme je m’y attendais, la prise de sang a montré qu’en effet Manille faisait une crise due à son hépatite. Elle suit un traitement depuis jeudi qui semble lui faire du bien. Aux repas elle a un steak haché et le « morceau de sucre qui aide la médecine à couler » c’est de la tomette du Tarn (traduction: je fourre ses médicaments dans un bon bout de fromage). Pauvre Manille!