Il est l’heure de clore cette série des souvenirs d’EHPAD. Pour l’occasion j’ai eu envie de parler de notre Manille préférée.
Archives de la catégorie : 15h58 Brèves En Série
Souvenirs d’EHPAD #22 : à la claire fontaine
Un vendredi après-midi, peu de temps après mon arrivée, une des résidentes m’a demandé de lui servir un verre d’eau sur la place du village.
Moi: Bien sûr! Où est l’eau?
La résidente, tendant le bras: Là.
Moi, me dirigeant à droite: Lalalalalère! (non c’est faux j’ai pas dit ça)
Souvenirs d’EHPAD #21: Madame Johnson
Je n’ai pas spécialement d’anecdote marrante avec cette dame mais je tenais quand même à écrire un article à son nom. Elle avait toute sa tête, elle était dans cet EHPAD pour une pathologie physique et je pense qu’à l’heure actuelle elle en est décédée. Je l’aimais beaucoup.
Implantation cochléaire #1 : la fièvre du mercredi matin
Cela fait des lustres que j’ai envie de prendre le temps de raconter comment se sont déroulées mes deux opérations pour la pose de mes implants cochléaires. Non pas la procédure chirurgicale car je dormais, et en plus j’ai pas fait médecine, mais de l’arrivée à l’hôpital à un peu après mon réveil post-opératoire. En effet, tout n’a pas été en ligne droite ou bien certains éléments m’ont faits rire et j’ai pensé qu’il fallait que je les réécrive un jour. Bon ben près d’un an après ma seconde implantation, deux ans et demi pour la première, on va dire que j’ai pris mon temps. Je me suis donc replongée dans mes souvenirs pour vous relater ces deux journées qui ont été très différentes l’une de l’autre. Pour que vous compreniez un peu mon état d’esprit, j’avais énormément de colère en moi lors de ma première chirurgie. Je pense que ça explique certaines choses, notamment mon réveil (teasing). J’ai essayé de retranscrire ça le plus possible (Papa tu vas adorer j’ai mis plein de gros mots dans ma première histoire). J’étais nettement plus « apaisée » pour ma seconde imppantation. Enfin, vous verrez. Bonne lecture!
Look sangsationnel (non, ne vomissez pas)
Le mercredi 16 juin 2021 fut programmé ma première implantation cochléaire. C’était également ma première chirurgie donc j’étais un peu novice en la matière. Père m’a emmenée très t´ôt à l’hôpital. On devait y être un peu avant 7h si je me souviens bien. L’infirmière est entrée une première fois dans ma chambre.
Souvenirs d’EHPAD #19 : les mains de Madame Limonade
Un jour Madame Limonade se traînait sur son fauteuil roulant dans le couloir menant à sa chambre. Elle était complètement perturbée et désorientée. J’ai décidé de la raccompagner dans sa chambre, un endroit familier où elle arriverait peut-être à se calmer. J’ai poussé son fauteuil sur les quelques mètres nous séparant de la pièce, non sans le cogner bien comme il faut au mur car je n’y voyais pas clair. On zigzagait, la vieille dame geignant qu’elle voulait mourir et la taupe-animatrice essayant de maintenir le cap avec son bolide.
On est arrivées dans sa chambre où j’ai laissé Madame Limonade en fermant la porte derrière moi afin qu’on ne l’entende plus.* Non j’ai pas fait ça, vous êtes de grands malades si vous y avez cru. Je me suis accroupie devant la dame et je lui ai tendu mes avant-bras. Ma cheffe nous avait expliqué que ça l’apaisait d’attraper les poignets des gens. Elle a donc pris les miens et s’est tue. Je lui ai caressé doucement les mains. Elle avait la peau très fine et je me souviens avoir pensé que ça ressemblait à de la peau de lait (c’était pas péjoratif, attention). Madame Limonade s’est calmée et s’est endormie comme ça, en serrant mes poignets dans ses vieilles mains toutes douces. Je me suis dégagée avec toute la précaution du monde et j’ai quitté la pièce sur la pointe des pieds.
* J’ai rédigé ce texte fin août 2023. Je l’ai relu une semaine avant sa publication et je suis tombée dans le panneau en redécouvrant cette phrase (« Mais t’as pas pu faire ça Bibi, c’est horrible!!! »).
Souvenirs d’EHPAD #18 : le bowling
L’une des activités que l’on mettait fréquemment en place était le bowling. Les quilles et la boule étaient en mousse de sorte à ^e que les résidents puissent les manipuler facilement (et accessoirement n’explosent pas le parquet avec la boule). J’aimais bien ramener ma fraise avec des anecdotes fort divertissantes pour distraire la galerie…
Moi: Vous vous rendez compte que des fois il y a des compétitions avec plus de cent quilles!
Mon collègue de service civique: Ah oui? T’as vu ça où?
Moi: Heu, sur la Wii… Wii Sport Resort…
Souvenirs d’EHPAD #17 : les illumination de Paris
Un après-midi de décembre, comme le soir tombait tôt, on est montés dans deux vans avec quelques résidents pour aller voir les guirlandes de Noël à Paris. J’étais au milieu sur la banquette arrière de l’un des vans et à ma droite se trouvait Madame Canari. La dame, qui avait un Alzheimer très avancé et une mémoire à court-terme limitée, n’arrêtait pas de me tapoter sur l’épaule pour me montrer les monuments devant lesquels nous passions. Tiens, là c’est tel truc, ici c’est tel machin (oui, non, je ne me souviens plus de ce qu’on avait vu). Et oh ça alors, voilà le restaurant où elle était allée pour son mariage. Marrant la mémoire quand même.
Souvenirs d’EHPAD #16 : Madame Vinaigre
Madame Vinaigre ne parlait pas français. Ce n’était pas sa langue maternelle en to1t cas. C’était une petite dame qui se déplaçait avec une canne et un bonnet. Elle avait toujours l’air en pétard. Elle baragouinait toujours contre la télé ou je ne sais pas quoi, en tout cas elle semblait énervée. Quand je la croisais je la saluais d’un « Bonjour Madame Vinaigre! » mais en général elle me répondait dans sa langue avec l’air de pester après quelque chose. La seule fois où je l’ai entendue parler français (et joyeusement en plus) c’était alors que je prenais l’ascenseur avec Manille. Elle s’est penchée vers la chienne et lui a dit: « Oh! Bonjour le chien! Tu es un gentil chien toi, oh oui! ».
Dialogue de l’espace avec Père #13 : Le retour du crop top
Manille est toute déplumée à la suite de son opération car elle a été rasée sur les pattes avant, un peu sur la patte arrière droite, un peu sur le cou, sur une bonne partie du dos et sur tout le ventre. Il va peut-être falloir la couvrir afin qu’elle n’ait pas froid. Père et moi préparant son retour par message:
Moi: Je prendrais le petit Manteau et le t-shirt de Manille. Je t’assure que le t-shirt est bien, on fera un essai au pire pour voir.
Père: Peut-être un t-shirt un peu plus joli ! Je vais regarder ce que j’ai, le blanc est pas terrible, je trouve que ça ne lui va pas trop.
Moi: Moi je trouve que ça fait ressortir son poil.
Souvenirs d’EHPAD #14 : Madame Fusée
Madame Fusée était un peu spéciale. Elle était assez atteinte cognitivement et avait pas mal d’idées obsédantes. L’une d’entre elle concernait les toilettes. Elle n’arrêtait pas de réclamer les toilettes aux aides-soignantes en disant qu’elle avait envie de faire pipi alors qu’il n’en était rien. En tout cas elle ne faisait rien et ses tests médicaux n’avaient montré aucun problème urinaire. C’était comme ça, ça faisait partie de son vieillissement. Il fallait être très patient avec elle.
Un jour, alors qu’on allait lancer une activité avec mon collègue de service civique, elle a commencé avec son idée de pipi. Il me semble qu’elle a essayé d’aller aux cuisines en pensant que c’était les toilettes et quand mon collègue a essayé de la ramener sur la place du village elle a mis les freins de son fauteuil roulant. Une mule. Je suis intervenue, reine de la patience que j’étais, et lui ai proposé de l’emmener dans les toilettes juste à côté. J’ai poussé le fauteuil sur 2 mètres mais avec mon scotome central c’était pas de la tarte. Les toilettes du rez-de-chaussée s’ouvraient avec une porte coulissante, elles étaient assez larges pour y rentrer avec un fauteuil roulant et la lumière s’allumait automatiquement grâce à un détecteur de mouvement. J’ai poussé Madame Fusée dans les toilettes puis je suis sortie en fermant la porte derrière moi. Elle était en capacité de se lever de son fauteuil et de se débrouiller pour son affaire.
On a lancé l’activité dans la salle juste derrière les toilettes. Au bout d’une heure, quand l’activité s’est terminée, les résidents sont sortis. Mon collègue et moi étions en train de ranger quand l’une des résidentes est revenue pour nous dire que « ‘y a une dame qu’est dans les toilettes dans le noir ». En fait Madame Fusée était restée devant la cuvette sans bouger de son fauteuil et la lumière avait fini par s’éteindre.
Vous vous direz sans doute: « Bibi t’es horrible, t’as enfermée une pauvre vieille dame sans défense dans les waters », mais curieusement le simple fait d’être dans cette pièce l’avait calmée.